Ce projet s'étale sur de nombreuses années. En quoi un travail sur le temps long était-il nécessaire pour le mener à bien ? J'ai passé environ quatre ans, de manière intermittente, à photographier les Ribeirinhos il y a une vingtaine d'années. À l'époque, je vivais à New York, où je travaillais en free-lance comme assistante de photographes et de cinéastes. Je suis ensuite retournée en Amazonie pendant plusieurs mois pour doc umenter la vie quotidienne et le travail des sages-femmes traditionnelles dans différentes régions de l'Amazonie. Dès le départ, j'étais intéressée par l'idée de raconter l'histoire des communautés ribeirin-has, et plus particulièrement celle des femmes. Le projet a commencé avec une approche assez ample mais s'est progressivement recentré sur les sages-femmes. Elles s'imposaient comme gardiennes de la vie, détentrices d'un savoir, et dépositaires à la fois des pratiques médicinales et de la culture locale. Par leurs déplacements, pour assister des naissances ou rendre visite à des femmes enceintes dans des foyers isolés au bord des fleuves, elles tissaient des liens invisibles entre les familles et les villages. Un engagement de courte durée n'aurait pas permis ce type de travail. Les relations prennent du temps, surtout lorsque l'on est une étrangère entrant dans des vies façonnées par d'autres environnements, d'autres histoires, d'autres rythmes. Le sujet même était profondément intime, nécessitant confiance et sensibilité. Au-delà de cela, le rythme de vie en Amazonie est lent, fluide. En voyageant seule et en logeant chez elles la plupart du temps, je cherchais à m'adapter à ce rythme et à observer comment les choses se dévoilaient. The Enchanted Ones n'aurait pas pu exister sans tout ce temps consacré. La particularité du livre est qu'il oscille entre documentaire et imaginaire, réalité et fiction. Comment est-ce venu ? C'est au cours de ces visites et des naissances - qui, en soi, demandent du temps - que j'ai commencé à découvrir une autre facette de ces femmes qui accompagnaient la vie à son arrivée comme à son départ : elles étaient aussi de formidables conteuses. Parmi leurs récits figuraient les mythes des Encanta-dos (les Enchantés),
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