Qu'est-ce qu'il vous faut pour faire une photo ? De l'émotion. Je photographie ce qui me touche. Je ne peux pas appuyer sur le déclencheur si je ne suis pas touchée par ce que je vois. Ensuite, de la rapidité parce qu'il faut foncer pour faire une photo. Je réfléchis après, mais lorsque je suis traversée par une émotion, c'est là que je déclenche. La première chose, c'est peut-être le fait d'oser. Ce n'est jamais évident de photographier les gens, par exemple… Le mot “oser” est important pour moi. Vous êtes née à Paris en 1944. Quelle enfant étiez-vous ? Résistante. Je suis née toute seule à la clinique Baudelocque, à Paris. Après-guerre, les longs dortoirs de cette maternité accueillaient les femmes sans argent. Ma mère m'a raconté cette histoire de nombreuses fois. Quelques heures avant ma naissance, le médecin est passé pour l'ausculter et lui a dit que ce n'était pas le bon moment. Quand il est revenu plus d'une heure après, il a soulevé le drap et m'a vue. Je n'avais pas pleuré, ma mère n'avait rien dit, et le cordon était enroulé autour de mon cou. Ma mère n'avait pas de prénom pour moi, elle ne voulait pas de fille. C'est la sage-femme, qui était d'origine espagnole, qui m'a donné le prénom Dolorès. On peut dire que je suis née toute seule, sans l'aide de personne. Ça a été mon credo dans la vie. Je me suis toujours débrouillée toute seule, envers et contre tout. J'étais une enfant extrêmement
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