Par photo de rue, on entend toute photo prise dans l'espace public urbain : dans la rue donc avant tout, mais cela compte aussi sur un marché ou une plage, dans un parc d'attractions ou une station de ski fréquentée, ainsi qu'en intérieur dans un magasin, une salle de jeux ou encore un café. Il s'agit en fait de capturer de manière immédiate les activités quotidiennes (diurnes ou nocturnes) de nos semblables (proches ou lointains), de préférence hors de tout événement exceptionnel, auquel cas on tombe dans le reportage. Le hasard est par conséquent le maître mot dans cette activité qui consiste à déambuler à la recherche d'un sujet sortant si possible de l'ordinaire. Les grands photographes savent que l'on peut également photographier un sujet ordinaire de façon extraordinaire, mais pour commencer, partons du principe qu'un bon sujet fait une bonne photo. Quand on débute en photo de rue et que l'on sort l'appareil au cou en quête de l'instantané parfait, on peut vite se trouver découragé par l'absence d'opportunité et l'angoisse de revenir bredouille. Il faut ainsi apprendre à être patient, c'est la plus grande qualité du street photographer, l'autre étant le sens de l'observation. Prenez Elsa Lebaratoux , autrice de la photo ci-dessous et des deux suivantes. Cela fait des années qu'elle arpente presque quotidiennement les rues de Paris à la recherche de situations insolites comme celle-ci. Sa persévérance a payé et elle publie aujourd'hui son premier livre, Flair . Lors d'une de ses sorties, elle a relevé cette vitrine pour le moins étonnante où se tenait ce chien résigné à son sort, une circonstance qu'elle a su sublimer par la présence de l'homme, qui répond à celle de l'animal. Une de ces scènes inattendues surgies du quotidien, qui semblent assez rares a priori mais qui finissent par se présenter de plus en plus souvent à un œil aguerri. Être photographe de rue, c'est d'abord apprendre à regarder et à décrypter les choses banales au-delà des apparences. Passants, vitrines comme ici, mais aussi panneaux de signalisation, publicités, véhicules, mobilier urbain, street art… tout est bon pour former des correspondances fertiles. Et pour cela, pas besoin d'aller très loin, à la recherche d'un endroit “photogénique” : en se baladant dans les quartiers touristiques de Paris ou d'une autre capitale, on aura plus de chances de rapporter des clichés “déjà vus” que si l'on reste en bas de chez soi. Cela dit, pour commencer sans frustration, nous vous conseillons de “tricher” un peu en vous rendant sur des regroupements qui vous offriront davantage d'opportunités en matière de situations : brocantes, fêtes, carnavals et manifestations sont également des moments “hors du quotidien” où il est généralement plus facile de photographier les gens. Pour se donner une direction fertile et orienter son regard, on peut aussi se lancer des défis thématiques, par exemple les chiens, les personnes au style affirmé, les touristes ou encore les sportifs dans la ville. Dans tous les cas, une bonne photo de rue fait interagir l'élément humain, ne serait-ce qu'à l'état de silhouette comme marqueur d'espace, avec son environnement. Il est donc nécessaire en permanence de prendre les deux en compte, sujet et décor, pour aller jusqu'à les faire fusionner ! Au-delà du repérage, il faudra savoir anticiper les déplacements du sujet et se positionner parfois rapidement, tel Cartier-Bresson, afin d'obtenir l'instant décisif et la perspective parfaite. Provoquez la chance S'il y a les photographes toujours en mouvement comme Cartier-Bresson, il y a aussi ceux qui préfèrent rester à l'affût et attendre qu'un sujet tombe dans leur “piège photographique”, c'est-à-dire un décor repéré au préalable pour son potentiel : contenu, perspective, lumière… Si le hasard fait bien les choses, un passant idéal se présentera, comme sur la photo ci-contre.
Rien ne va dans l'image ci-dessus, et pourtant tout fonctionne : le personnage en train de peindre est cadré de façon lointaine et de dos, l'autre a le haut du corps coupé, un poteau (ennemi public no 1 des photographes de rue) apparaît au premier plan, et, pour ne rien gâcher, le temps est gris. Mais ce désordre semble obéir à un agencement mystérieux qui interpelle et séduit l'œil dans le même temps. C'est que la photo repose sur
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