Chapitre 13 Mort et enterré. Tout était fini, Nonna et elle en deuil, Madeleine, pareille à une petite corneille, Madeleine qui répétait, incrédule : - Il va revenir, dis ? Il ne reviendrait pas. Jamais. Et tout était sa faute. C'est elle qui avait frappé leur père et donné le signal du départ de Paris. Elle qui parlait si souvent de l'Italie à Marco : Florence, le souvenir de leurs vacances d'autrefois, sous-entendant que tout irait mieux une fois qu'ils seraient là-bas. Qu'ils pourraient recommencer leur vie. Chacun n'a-t-il pas droit à une seconde chance ? Ça avait fini par devenir leur rêve à tous les deux. Marco s'y était laissé prendre, enthousiaste, confiant en sa bonne étoile, comme toujours. Elle l'avait regardé empocher l'argent facile des touristes. « Le paquet de dollars ». Elle n'avait pas su le protéger. Un mauvais coup de couteau sous les côtes, avait dit le médecin. Le foie avait été touché. Marco aurait pu, aurait dû, mourir dans les minutes qui avaient suivi. Là encore, l'homme de sciences était formel. Le jeune homme avait tenu le coup jusqu'à ce qu'elle arrive. Elle faisait tout pour oublier ses dernières paroles, ne gardant à l'esprit que ce prénom, prononcé dans la douceur des derniers instants : Alba. Elle avait attendu que l'on emmène son frère dans un couvent proche où l'on prendrait soin de lui, lui avait-on assuré, le temps que Nonna soit avertie. Mais au lieu de courir chez sa grand-mère, Esther s'était rendue au café où travaillait Marco afin de transmettre sa toute dernière pensée à celle qu'il aimait. D'une certaine façon, Alba, son père et même les autres serveurs, étaient, avaient été, la nouvelle famille de Marco : sa famille de cœur. Elle ne savait pas comment elle avait trouvé son chemin dans le dédale des rues, pourtant, elle y était parvenue. La terrasse du café était encore pleine de monde. Ici, dans la totale inconscience des drames qui se produisaient alentour, les gens se détendaient entre amis. Elle entendait leurs rires monter dans la fraîcheur du soir. Elle aurait voulu crier le nom de Marco pour qu'ils sachent, tous. Elle n'en avait pas eu le courage, se contentant d'accrocher l'un des serveurs, dont le visage ne lui disait rien. - Je voudrais parler à votre patron. C'est important. Il avait désigné l'homme chauve qui paradait derrière le bar. - Bonsoir, Monsieur, avait-elle dit. Je suis la sœur de Marco : Esther. Aussitôt, une brunette qui se tenait à quelques pas de là avait levé des yeux anxieux sur elle. - Je suis Alba, avait-elle dit en s'avançant. Une minute plus tard, toutes deux pleuraient dans les bras l'une de l'autre. Chercher le coupable. En d'autres circonstances, Esther y aurait peut-être attaché de l'importance. Elle avait écouté le père d'Alba vociférer contre « les bandes de voyous », tout en sachant qu'il ne s'agissait là que d'une manifestation de sympathie envers la sœur de celui qui aurait peut-être fini par épouser sa fille unique. Elle savait qu'il n'y aurait pas d'enquête. La loi de l'omerta sévissait dans certains quartiers de la ville. Difficile de l'ignorer. Le père d'Alba avait beau
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