Deux morts. Et dire que j'étais venu ici, dans cet hôtel d'El-che, pour me reposer après des mois à traîner un mal-être que je n'osais pas appeler dépression. Le départ de Laurence m'avait laissé KO. Je me souviens comme si c'était hier du jour où le soixante-huitard attardé que j'étais, champion du “la bague au doigt c 'est pour les petits-bourgeois”, avait supplié Laurence de passer devant Monsieur le maire. À l'époque, je débutais dans le nouveau métier qui m'amène aujourd'hui à vous raconter cette histoire. Auparavant, j'avais été un étudiant sans vocation, se prélassant dans un agréable état d'apesanteur ; couché et levé très tard, de furtifs passages en cours pour récupérer les polycopiés bachotés bêtement pour avoir le diplôme. J'avais choisi le droit après avoir un instant effleuré l'idée des lettres, mais j'avais gardé de trop mauvais souvenirs des lectures publiques de mes œuvres devant mes camarades, soulagés que, pour une fois, ça ne tombe pas sur eux. Avec le droit, je me disais que je ferais bien quelque chose ; traduisez, n'importe quoi. Ça avait été le cas ; employé dans une compagnie d'assurances, je devais vendre des assurance-vie mais j'y mettais si peu de conviction que mon patron me remercia vite. Un de mes copains me fit alors embaucher dans son journal pour remplacer le journaliste chargé des faits divers, hospitalisé pour quelques mois. J'y passai presque un an et j'en tirai un semblant - ce serait présomptueux de parler de vocation - d'envie de devenir flic, après une enquête sur la mort d'un notable local assassiné qui m'avait passionné. J'avais découvert ce que jusque-là je soupçonnais seulement, l'envers du décor ; des êtres respectables dans une ville tranquille. Avec un beau brin de plume, j'en aurais sans doute fait un roman. Mais, de ce côté-là, je n'étais pas du
Le contenu complet de cet article est réservé aux abonnés. Vous pouvez également acheter Pleine Vie n°394 au format digital. Vous le retrouverez immédiatement dans votre bibliothèque numérique KiosqueMag.
Voir plus